Les entreprises de Français à l’étranger : un outil du rayonnement de la France

Rencontre avec Alain Taïeb, président EFE International et président du Groupe Mobilitas

Propos recueillis par Joselyne Studer-Laurens, CCE

Vous êtes mobilisé depuis longtemps par le développement des entreprises françaises à l’étranger…

Je suis dirigeant d’une ETI totalement internationalisée et CCE ayant vécu plus de 37 ans à l’étranger. J’ai placé le soutien à l’internationalisation des entreprises à taille humaine et au développement des V.I.E au cœur de mes engagements. Pour aller plus loin, il faut aujourd’hui que les entreprises de Français à l’étranger puissent proposer des missions pour des V.I.E.

Quelle définition donnez-vous aux EFE, entreprises de Français(e)s à l’étranger ?

Ce sont des entreprises de droit local dirigées et contrôlées par une ou des personnes de nationalité française (en fonction de la limite imposée par la législation locale), quels que soient leurs secteurs d’activité et leurs tailles. On estime à 3,6 millions le nombre de Français(e)s vivant à l’étranger. Parmi eux, des Français(e)s qui ont créé des entreprises dans des domaines d’activité très divers (des clubs de sport, des restaurants, des commerces, des prestations intellectuelles…) et qui contribuent à promouvoir les savoir-faire, technologies et produits français.

En quoi ces entrepreneurs jouent-ils un rôle positif pour la France ?

Les entrepreneurs français de l’étranger contribuent directement et indirectement au rayonnement de notre pays à l’international : de notre culture, de nos produits et savoir-faire, de nos entreprises. Présents à l’étranger depuis une ou plusieurs générations, ils sont un atout du soft-power français. Insuffisamment reconnus, ils participent pourtant souvent activement au partage d’informations et de conseils à propos de leur pays d’implantation, à l’apport des bons « leads », aux mises en relations indispensables aux affaires. Par exemple, les architectes français présents à l’étranger portent avec eux le savoir-faire et la technologie française et essaiment une forme de French touch. Enfin, les entrepreneurs français de l’étranger reviennent souvent en France, y ont conservé des attaches et des biens et peuvent y investir soit au titre de leur entreprise dans le cadre d’une nouvelle étape de son développement ou d’une « relocalisation », soit à titre personnel. Ils sont donc une source de création de valeurs en France.

Quel est le contexte de la création d’EFE International[1] ?

Pendant la période du Covid, un grand nombre d’entrepreneurs français à l’étranger ont connu des difficultés et leurs entreprises n’ont pas pu bénéficier des soutiens accordés aux entreprises en France. Parallèlement, le nombre de V.I.E en poste a chuté ainsi que le nombre de missions proposées. Cela a été un élément déclencheur pour aller plus loin dans les initiatives en faveur des EFE et des V.I.E. La création d’EFE International en 2021, est donc le fruit de la volonté commune des CCE et de CCI France International, présidés respectivement à l’époque par Alain Bentéjac et Renaud Bentegeat, d’une part d’accompagner dans leurs développements les entreprises des Français de l’étranger ayant un impact positif sur l’activité économique en France et de renforcer leurs liens avec la France, d’autre part, en accord avec Business France, de pouvoir proposer des missions V.I.E dans ces EFE.

Quel est son statut juridique ?

EFE International est une SAS à capital variable fondée par les CCE et CCI France international. Après avoir été agréées par le comité stratégique d’EFE International sur avis du comité CCE et de la CCI française de leur pays d’implantation, les EFE répondant aux critères peuvent rejoindre le capital social d’EFE International, qui peut ensuite proposer et porter des missions de V.I.E. En septembre 2023, 34 EFE sont entrées au capital d’EFEI. 50 V.I.E sont en poste ou en cours de recrutement. Voir tableau des pays dans lesquels la formule V.I.E d’EFE International est disponible[2].

Quelles sont les prochaines étapes ?

Un travail collectif est en cours au travers de deux groupes de travail « Services » et « Finances » afin d’apporter aux EFE contribuant au rayonnement de la France des réponses opérationnelles à certains de leurs besoins/difficultés. La sensibilisation et la mobilisation autour du sujet « Les EFE un atout pour la France » ont également été lancées tant à l’étranger qu’en France. En 2023 des réunions ont déjà été organisées en Israël, en Tunisie, à Dubaï et Abu Dhabi par les CCE, les chambres de commerce françaises et l’Ufe. D’autres sont au programme 2024 de ce tour du monde. Et deux tables rondes ont été organisées, la première en vidéo, la seconde à Paris lors de la 39^e session de l’Assemblée des Français de l’étranger.

Une plus grande prise en compte des EFE par les pouvoirs publics et une mise en valeur de leur contribution au rayonnement de la France est également essentielle. Il ne s’agit pas de créer un statut donnant accès à des aides publiques mais d’apporter à la fois un cadre et une forme de reconnaissance et de crédibilité. Cela pourrait passer par un texte de loi et/ou un label permettant de préciser ce qu’est une EFE et des critères d’éligibilité. Une proposition de loi a été adoptée au Sénat en mai dernier et un projet de texte a également été déposé en mars à l’Assemblée nationale. Dans son discours du 30 mai 2023 au Sénat, Olivier Becht, ministre délégué chargé du Commerce extérieur, de l’Attractivité et des Français de l’étranger, a tenu à souligner l’importance de cette action aux yeux du Gouvernement français et la complexité à prendre en compte[3].

[1] https://www.forum-efe.org/

[2] Liste_pays_EFE_International_2022

[3] Intervention au Sénat du ministre Olivier Becht : https://www.youtube.com/watch?v=ZEM-vUr98F8

Quelques chiffres :

33 EFE au capital d’EFE International issues de 19 pays couvrant 5 continents

50 V.I.E en poste ou en cours de recrutement depuis la création du dispositif

19 offres V.I.E actuellement à pourvoir

5 EFE en cours d’intégration au capital d’EFE International